Leçons apprises en travaillant avec des gens qui se retrouvent sans abri

J’aimerais attirer immédiatement votre attention sur le titre de ce billet. Remarquez qu’il n’est pas intitulé « Leçons apprises en travaillant avec des sans-abri ». Je pense que la distinction réside en gros dans tout ce que j’ai appris pendant mes 24 années de travail dans des refuges et des centres d’accueil à Toronto.

 

Il y a une grande différence entre ces expressions : « des gens qui se retrouvent sans abri » et « des sans-abri ». Si je pense simplement aux « sans-abri », il est facile d’oublier l’humanité de ces personnes auxquelles on fait référence. Le terme « sans-abri » laisse entendre que, durant leur vie entière, tout un groupe de personnes sont sans-abri. Ce terme ne tient pas du tout compte de l’humanité de chaque personne de ce groupe.

 

Si je pense à une « personne qui se retrouve sans abri », l’emphase est d’abord placée sur son humanité plutôt que sur son statut de sans-abri. Ce qui ouvre notre esprit au fait que la personne en question est un véritable être humain, que du sang rouge coule dans ses veines, qu’elle éprouve des douleurs et des joies, qu’elle a des espoirs, des rêves et des désappointements, des talents et des défauts, une famille et des amis.

 

Tout comme nous.

 

Prenons l’exemple de « Rusty ». Je l’ai rencontré il y de nombreuses années au centre d’accueil dont je m’occupais à l’époque. Il était toujours ivre et on pouvait facilement l’oublier et le mésestimer. Et c’est ce qui se produisait souvent. En apprenant à le connaître, j’ai découvert son histoire. Il a subi des sévices lorsqu’il était bébé et il a été retiré de son foyer par les services d’aide à l’enfance. Une famille aimante l’a adopté avant même ses 2 ans, mais le dommage était déjà fait. Il était blessé. Il a commencé à boire dès qu’il a pu se procurer de l’alcool et il n’a jamais arrêté. Mais chaque fois que je le voyais, il avait le plus contagieux des sourires. Et il était très serviable. Il m’a aidé au centre d’accueil en faisant des tâches qui ont beaucoup facilité la direction. Il possédait très peu de choses, mais il se montrait toujours extrêmement reconnaissant pour ce qu’il avait. Il était très encourageant et est devenu pour moi un ami très cher.

 

Rusty faisait partie de la multitude de « gens qui se retrouvent sans abri » qui m’ont appris qu’on ne peut pas juger d’après les apparences. Chaque personne que j’ai rencontrée au fil des ans a sa propre histoire et sa propre valeur, et apporte sa propre contribution dans ce monde. Avant d’entreprendre ce travail, je n’aurais jamais pu imaginer à quel point tous mes amis de la rue enrichiraient ma vie. J’ai vraiment compris qu’il n’est pas question de « nous » et d’« eux ». Il est simplement question de « nous », et nous sommes ensemble dans ce qu’on appelle la vie.

 

Je suis vraiment reconnaissant d’avoir le privilège de travailler auprès de gens qui se sont retrouvés sans abri, peu importe ce dont ils ont l’air ou ce qu’ils sentent, ce qu’ils ont fait ou non, ou l’endroit d’où ils proviennent.

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